vendredi 22 janvier 2010


F,P,D Univers. Frida Kahlo pintó su vida
Véronique Prat
15/01/2010 | Actualizado: 18:19 |

De los 143 cuadros que componen la obra de Frida Kahlo, dos tercios son autorretratos. Es bien sufriendo martirio (arriba), "La columna rota" (1944) o india tehuana, vestidos con largas faldas y chales con flecos, bajo la pesada corona de su cabello ( "Autorretrato con mono y Parrot, 1942). Fotografías: (AKG)
Su existencia fue una tortura física, sino que ha transformado su martirio en el desarrollo de una obra singular. Retrato de un artista que ha construido su leyenda después de tela de lona.

Frida Kahlo peint sa vie
Véronique Prat
15/01/2010 | Mise à jour : 18:19 |

Des 143 toiles qui composent l’oeuvre de Frida Kahlo, deux tiers sont des autoportraits. Elle se représente soit en martyre de la souffrance (ci-dessus), «La Colonne brisée» (1944), soit en Indienne tehuana vêtue de longs jupons et de châles frangés, sous la lourde couronne de ses nattes («Autoportrait avec singe et perroquet », 1942). Crédits photo : (AKG)
Son existence fut une torture physique, mais elle a su métamorphoser son martyre en élaborant une œuvre singulière. Portrait d'une artiste qui a construit sa légende toile après toile.

On pensait tout savoir sur Frida Kahlo, tant sa vie et son art ont inspiré de livres, d'expositions, de films. Ses toiles atteignent des prix exorbitants. Sa vie de femme blessée, brisée, mutilée a fait d'elle une icône de la souffrance sauvée par l'art. Dans les années 80, on assistait à une véritable « fridamania » : Madonna a collectionné ses œuvres, le couturier Jean-Paul Gaultier lui a consacré une collection, tout entière inspirée par le style « princesse inca » de Frida, on a donné son nom à des poupées et à une marque de tequila. Après la Vierge de Guadalupe, elle est l'image la plus vendue au Mexique. En 2007, pourtant, année des cinquante ans de la mort de Diego Rivera, avec lequel elle a formé un couple légendaire, et des cent ans de la naissance de Frida, ce fut la surprise : une trentaine de malles contenant des dessins, des lettres, des objets personnels du couple Rivera-Kahlo, restées pendant plus d'un demi-siècle à l'ombre et au secret, étaient découvertes. Il y avait là plus de 22 000 documents. Une étrange histoire.

Un an après la mort de Frida (1954), Diego Rivera retrouve Dolores Olmedo, une amie-amante qu'il avait connue en 1928 à Mexico alors qu'il peignait des fresques au ministère de l'Education. Il l'avait ensuite perdue de vue. Ils se retrouvent en 1955. Dolores sera la confidente de Diego jusqu'à sa mort en 1957. Elle sera aussi pour lui un mécène généreux : il lui demande d'acheter ses œuvres proposées sur le marché pour constituer un musée Rivera. Elle en réunira plus d'une centaine. Et quand Diego apprend que la famille de l'ingénieur Eduardo Morillo Safa, le plus grand collectionneur d'œuvres de Frida, vend 25 toiles parmi ses plus belles, il demande à Dolores de les racheter. Depuis cette date, les toiles restèrent dans sa famille. La collection Olmedo devint ainsi un détour indispensable pour la connaissance des œuvres de Frida Kahlo et de Diego Rivera. D'autant plus qu'avant de mourir, Diego légua à Dolores la trentaine de caisses qui abritait les documents personnels des deux artistes : une foule de photographies, dont certaines signées Brassaï et Man Ray, de croquis, de livres annotés, de souvenirs intimes. Rivera avait demandé que les caisses ne soient pas ouvertes avant 1972 (quinze ans après sa mort), mais Dolores Olmedo les garda secrètes jusqu'à sa propre mort, en 2002. Ce fut ensuite au tour des archivistes d'étudier ces milliers d'objets émouvants. Révélés au public en 2007, sans toutefois quitter Mexico, ils seront pour une part présentés à l'exposition de Bruxelles, aux côtés des merveilleuses toiles de Frida de la collection Olmedo.

Elle ne s'intéresse pas plus au surréalisme qu'à l'abstraction

Toute la vie de Frida resurgit soudain. Douloureuse et passionnée, cette vie avait tout pour faire d'elle un mythe à la Van Gogh, à la Modigliani, à la Camille Claudel, à la manière de tous ces artistes au destin tragique. Elle est née au Mexique, le 6 juillet 1907. Pourtant, elle prétendra avoir vu le jour en 1910, l'année de la révolution nationale, celle où Emiliano Zapata, depuis le sud du pays, lance sa grande insurrection. A 6 ans, elle attrape la poliomyélite : sa jambe droite restera atrophiée. Pour ne plus entendre ses camarades de classe lui lancer au visage l'horrible surnom qu'elles ont inventé, « Frida jambe de bois », elle s'habille en garçon ou porte de hautes chaussettes de laine épaisse, malgré la chaleur. Son destin bascule un soir de septembre 1925 : elle rentre chez elle en bus quand, dans Mexico, le tramway de Xochimilco arrive sur les rails que le bus allait franchir. Le tram ne va pas bien vite, le bus a peut-être le temps de passer. Peut-être pas. Le tram vient heurter le bus en son centre, le projetant contre un mur. Frida a le corps transpercé par l'accoudoir métallique de la banquette, sa colonne vertébrale est brisée. «J'ai été déflorée par un autocar», dira-t-elle plus tard avec ironie. Suivront trente-deux opérations chirurgicales, trois interruptions de grossesse, et une amputation de la jambe. Désormais sa vie se déroulera dans les caillots de sang et l'odeur du chloroforme, les bandages, les aiguilles et les scalpels, comme autant de banderilles.

Elle a le corps sanglé dans des corsets de plâtre, tiges métalliques et autres instruments de torture qui la laisseront, pour finir, totalement invalide dans un fauteuil roulant. Après l'accident, sa mère lui installe un lit à baldaquin avec, en guise de plafond, un miroir pour rompre l'univers clos de cette chambre de malade. Frida est seule avec elle-même, avec son image, avec ses angoisses. Mais c'est l'acte fondateur de toute sa trajectoire : elle va s'évader par la peinture. Avec un petit chevalet qu'elle peut caler sur ses genoux, des pinceaux et des couleurs, elle va se prendre pour modèle. A l'exemple de Rembrandt et de Van Gogh, elle racontera sa vie à travers ses autoportraits. Les états de passion, de souffrance, et finalement de renoncement, sont aussi émouvants chez la Mexicaine que chez les deux grands Hollandais. Peindre ne sera jamais pour Frida Kahlo une recherche d'évolution stylistique ou une question d'adhésion à l'avant-garde : elle ne s'intéresse pas plus au surréalisme qu'à l'abstraction. Sa peinture est essentiellement autobiographique : une composition simple, qui place sans hésiter la figure au centre, une touche régulière, une lumière égale. Il y a là une volonté d'évidence et de simplicité qui rappelle l'imagerie religieuse.

Dès qu'elle peut se lever, avec une soif de vivre à la mesure de ses longs mois d'immobilité, Frida fréquente le milieu artistique. Elle va y rencontrer Diego Rivera, le plus célèbre des peintres muralistes mexicains, un géant de 2 mètres et de 120 kilos, surnommé « le Picasso du Nouveau Monde ». Il est d'une fascinante laideur, elle est d'une étrange beauté. Il est célèbre, elle débute. Il a 43 ans, elle en a 22. Ils vont se marier en 1929. Drôle de couple : elle l'adorait, il la trompait, il s'excusait, elle se vengeait. Ils divorcèrent, ils se remarièrent. Ils étaient inséparables. Ils s'aimaient.

Ensemble, ils s'installent dans la maison d'enfance de Frida, la Casa Azul. Pendant deux ans, ils vont y accueillir Trotski, en exil. En 1938, ils reçoivent André Breton, envoyé par le Quai d'Orsay pour une tournée de conférences au Mexique. Le pape du surréalisme est ébloui par l'œuvre de Frida, qu'il invite à venir exposer à Paris. Elle n'y sera pas heureuse, mais l'exposition sera un vrai succès d'estime : elle fait la connaissance de Paul Eluard et de Max Ernst, Kandinsky se dit «touché aux larmes» par son œuvre, Yves Tanguy et Joan Miró sont enthousiastes, Picasso, en signe d'amitié, lui offre une paire de boucles d'oreilles en ivoire. Frida refuse pourtant d'adhérer au groupe surréaliste et de suivre les diktats d'André Breton : «Je n'ai jamais peint mes rêves, dit-elle, j'ai peint ma réalité.»

Il y a les jours heureux et les nuits noires où elle souffre «comme une bête»

En 1939, Frida et Diego divorcent, pour se remarier l'année suivante : séparations, trahisons réciproques, orages, rien ne parviendra à les arracher l'un à l'autre pendant vingt-neuf ans de tempête. Il y a les jours heureux, où Frida surmonte la douleur, et puis les nuits interminables, où elle souffre « comme une bête ». Durant toutes ces années, tantôt elle se peint en déesse inca, les cheveux nattés, ornés de fleurs et de rubans, le regard flamboyant, tantôt elle raconte presque naïvement, à la manière d'un ex-voto, les blessures de son corps brisé. Elle boit beaucoup, de plus en plus, du cognac, deux litres par jour : on retrouve les bouteilles vides au pied de son lit. Elle mélange l'alcool à ses médicaments, puis à la morphine. Son médecin lui en a prescrit pour soulager ses douleurs, mais elle double, triple les doses. Elle peint moins, elle a le geste moins sûr, mais elle poursuit son journal, où elle parle d'art, d'amour, de politique, de sexualité, de la vie. Plus d'un demi-siècle après sa mort, le charme envoûtant de son œuvre, qui est aussi celui de son poignant journal, opère toujours. Un charme bien cerné par André Breton, qui comparait l'œuvre de Frida à «un ruban noué autour d'une bombe».

Palais des beaux-arts, 23, rue Ravenstein, 1000 Bruxelles, jusqu’au 18 avril 2010.



"Ideas del hombre y más .......".

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