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jeudi 12 novembre 2009
F,P,D Univers. Dans les coulisses de «L'Enfer», film maudit de Clouzot
Emmanuèle Frois
06/11/2009 | Mise à jour : 11:16 |
Serge Bromberg dévoile les mystères de cette œuvre inachevée, dans un ouvrage et un documentaire passionnants.
Les images inconnues de L’Enfer , film inachevé d’Henri-Georges Clouzot, voient enfin le jour grâce à la passion et l’acharnement d’un homme qui en a tiré un livre magnifique, Romy dans L’Enfer * et un documentaire palpitant, L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot ( sortie mercredi prochain, voir critique ). En 2005, Serge Bromberg, producteur et restaurateur de longs-métrages, exhume les 185 boîtes de films invisibles depuis un demi-siècle, « bloquées » pour raisons juridiques et soigneusement conservées aux Archives françaises du film. Seulement quinze heures d’images muettes, non montées, à partir desquelles Bromberg a tenté de reconstituer l’histoire de cette œuvre énigmatique, qui a alimenté les fantasmes des cinéphiles. L’Enfer , un tournage maudit interrompu au bout de trois semaines par l’infarctus de son réalisateur. Une aventure démesurée, dantesque, au budget illimité. Un rêve artistique qui a viré au cauchemar. « À trop vouloir s’approcher de la perfection formelle et de son rêve improbable, il s’y est brûlé les ailes », estime Serge Bromberg à propos de Clouzot.
Le réalisateur, à qui l’on doit notamment L’Assassin habite au 21, Le Salaire de la peur et Le Corbeau, n’a alors pas tourné depuis quatre ans. Il sort d’une dépression, s’est retiré à Tahiti où il a débuté l’écriture de L’Enfer qui devra, selon lui, révolutionner le cinéma. Il propose à Romy Schneider, 26 ans et à Serge Reggiani, 42 ans, d’en devenir les héros. Romy Schneider veut montrer que Sissi est loin. Clouzot, séduit, réécrit pour elle la version finale de ce drame de la jalousie. Marcel Prieur (Serge Reggiani), patron d’un petit hôtel de province se demande si Odette (Romy Schneider), sa femme, ne l’a pas odieusement, scandaleusement, trompé. « Point de preuves : seulement des présomptions, mais terribles », écrit Clouzot.
La folie s’empare de Marcel. Clouzot veut filmer le cerveau malade de son héros. Mettre la paranoïa en image devient son obsession. Et puisque les producteurs de la Columbia lui ont offert un budget illimité, il en profite pour expérimenter différents procédés. Il met au point avec Éric Duvivier – qui avait réalisé avec Henri Michaux Image du monde visionnaire, film illustrant des visions hallucinatoires sous mescaline – un système d’éclairage particulier, l’Héliophore. Il se passionne pour les effets cinétiques, et demande à Joel Stein et Jean-Pierre Yvaral de collaborer avec lui. Pendant six mois, Clouzot tourne les essais préparatoires de L’Enfer dans le huis clos des Studios de Boulogne. Romy Schneider devient objet de fascination. Il la filme, des heures durant, le visage recouvert de paillettes et d’huile d’olive, ou bien peint avec un maquillage multicolore. Elle n’a jamais été aussi belle. Hypnotique, incandescente, érotique, sensuelle, elle se prête à tous les fantasmes, à tous les désirs cinématographiques de Clouzot. Son contrat précise qu’elle ne fera aucune scène dénudée. Pourtant elle accepte de tourner nue la séquence où, enchaînée aux rails de la voie ferrée, un train fonce sur elle.
Le tournage démarre en juillet 1964, à l’hôtel du Lac, au pied du viaduc de Garabit (Cantal). Clouzot est à la tête de trois équipes, véritable armée de cent cinquante techniciens. Mais le perfectionnisme du cinéaste, qui multiplie les prises, et le manque de coordination entre les troupes ralentissent considérablement le tournage. Tyrannique, insomniaque, il réveille ses techniciens pour parler du scénario, en réécrit les pages pour le lendemain. Les rapports avec Reggiani se détériorent. L’acteur, dépressif, est hospitalisé. On évoque la fièvre de Malte, transmise par le fromage de chèvre que Reggiani se fait livrer de Corse ! En fait, l’acteur n’a plus la force d’affronter le monstre sacré. Clouzot, usé, stressé, fait un infarctus. La production est temporairement interrompue. Les experts des assurances décident que le tournage ne reprendra jamais. L’Enfer aura coûté plus de 5 036 000 francs aux assurances. Clap de fin. Et début de la légende.
NOTRE AVIS
D’abord il y a ces images extraordinaires, hypnotiques, dévoilées après quarante-cinq années de sommeil. Cela tient déjà du miracle. Scènes en noir et blanc ou en couleur, toutes muettes. Avec Romy Schneider, belle à tomber, qui ondule en skis nautiques sur le lac artificiel de Garabit. Serge Reggiani qui court sur le viaduc, à bout de souffle, jusqu’à la déprime… Serge Bromberg a construit son passionnant documentaire à partir de ces rushs, ces petits fragments de pellicule retrouvés en insérant, dans un jeu de piste fort bien construit, les témoignages des survivants de ce tournage maudit et inachevé. Interviews, entre autres, de Costa Gavras assistant à la réalisation lors de la préparation du film, de Bernard Stora qui était stagiaire, de William Lubtchansky alors assistant opérateur… Ils nous font entrer au cœur même du travail de Clouzot, dans sa folie de perfection, dans ses obsessions, dans sa recherche permanente de nouvelles formes cinématographiques, à grand renfort d’effets spéciaux au rendu éblouissant. Pour faire le lien avec l’histoire du film, Bérénice Bejo et Jacques Gamblin lisent quelques scènes du scénario original, se mettant dans les pas de Schneider et Reggiani. Un scénario que la femme d’Henri-Georges Clouzot, Inès Clouzot, propriétaire des droits, n’avait encore jamais voulu donner. Elle n’a pas résisté à Serge Bromberg. Nous non plus.
* «Romy dans L'Enfer», texte de Serge Bromberg. Albin Michel-Lobster (25 €).
La bande-annonce :
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