dimanche 18 octobre 2009


F,P,D Univers. Une île surgit dans l'estuaire de la Gironde
Pauline Fréour (lefigaro.fr)
15/10/2009 | Mise à jour : 08:11 |

L'île s'est formée par accumulation de sédiments à l'entrée de l'estuaire, à deux kilomètres du phare de Cordouan (ci-dessus), surnommé «le roi des phares». Crédits photo : AFP
A deux kilomètres du phare de Cordouan, des sédiments se sont accumulés sur 4 hectares, formant un territoire encore ignoré des cartes. Un phénomène extrêmement rare.

Elle n'est pas apparue du jour au lendemain, mais à l'échelle classique de formation des continents, sa naissance pourrait être qualifiée d'assez soudaine. Selon les témoignages recueillis auprès des plaisanciers, l'émergence de ce vaste banc de sable remonterait au mois de mars. Aujourd'hui, l'îlot présente 4 hectares découverts à marée haute et une centaine à marée basse, à deux kilomètres du célèbre phare de Cordouan. «On avait déjà vu une dune grandir dans l'estuaire sous l'effet de l'accumulation de sédiments, mais elle était rattachée à la côte. Une île qui se forme au milieu de l'estuaire, voilà un phénomène tout à fait nouveau», s'émerveille Jean-Marc Thirion, écologue et président de l'association Obios (Objectifs biodiversité) contacté par lefigaro.fr.

Difficile d'expliquer avec précision le mécanisme ayant conduit à l'émergence de ce bout de terre, mais pour le scientifique, l'accumulation d'un si grand volume de sédiments à cet endroit est sans doute liée à «l'importante érosion des côtes charentaises, qui s'est accentuée ces dernières années sous l'effet des deux ouragans, Martin en 1999 et Klaus en 2009».

Aujourd'hui, on recense sur l'île une douzaine de plantes différentes, dont une partie relevant de la végétation spécifique aux dunes. Autant de signes, selon Jean-Marc Thirion, que le milieu évolue «vers quelque chose de plus complexe».

Fêtards et parachutistes investissent l'île

Mais cet écosystème fragile pourrait être victime de sa toute nouvelle notoriété. «Ça devient presque un lieu à la mode. Deux cents personnes sont venues faire la fête sur l'île début septembre, et l'autre jour, elle a servi de terrain d'atterrissage à un groupe de parachutistes. Or, c'est un lieu sensible au surpiétinement», s'alarme l'écologue, qui s'est pour sa part rendu sur place à deux reprises avec d'autres naturalistes pour étudier la faune et la flore locales.

Outre la question de sa protection, celle de l'attribution de l'île à telle ou telle commune proche ne devrait pas manquer de se poser. «Il va falloir la géo-référencer. On est un peu perdu, il y a un vide juridique autour de cette question», constate Jean-Marc Thirion. De toute façon, selon lui, «aucune commune ne semble vraiment s'en préoccuper » pour l'instant. C'est encore la ville de Royan, en la personne de l'adjoint au maire chargé de l'environnement, Bernard Giraud, qui s'intéresse le plus à ce territoire surgit des eaux, rapporte Sud Ouest. Opposé à l'implantation d'un terminal méthanier sur la pointe du Médoc, il voit dans cette île le signe que les déplacements de sable sont plus complexes à prévoir que ne le laissait entendre un rapport commandé par le grand port maritime de Bordeaux. Et que les efforts pour maintenir un chenal de navigation risquent d'être, de ce fait, plus coûteux que prévu.

Reste à savoir si l'île ne va pas disparaître aussi vite qu'elle est apparue. «Il se peut en effet que ce ne soit que transitoire, admet Jean-Marc Thirion. Mais le volume important de sable qui se déplace dans l'estuaire laisse penser qu'il y a de fortes chances pour que ça se pérennise».



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